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Discours du président du RCD, Atmane Mazouz à l’occasion de la Journée de la Mémoire

Discours du président du RCD, Atmane Mazouz à l’occasion de la Journée de la Mémoire

Mesdames, Messieurs,

Chers militants, chères militantes,

Amis(es) et invités,

Nous voici réunis aujourd’hui en cette Journée de la Mémoire du RCD, non pour déplorer le passé, mais pour le convoquer dans toute sa vérité, pour en tirer force, lucidité et courage. Nous sommes ici non pas pour un exercice de nostalgie, mais pour un acte politique : dire notre histoire, la vraie, sans concession, sans soumission, sans dissimulation.

La mémoire n’est pas une incantation, encore moins une rente. C’est une responsabilité. Et dans notre pays, cette responsabilité est piégée, falsifiée, instrumentalisée par un pouvoir qui se nourrit de l’amnésie collective pour mieux étouffer l’avenir.

L’histoire officielle que le régime algérien tente d’imposer depuis l’indépendance est une histoire mutilée, sélective, servie au peuple comme un catéchisme. Une histoire sans débats, sans zones d’ombre, sans contradictions. Une histoire qui glorifie les clans et efface les voix résistantes. Une histoire qui célèbre le pouvoir et bannit la démocratie. Or, notre mémoire nationale est bien plus vaste, plus tragique, plus rebelle que cette version édulcorée.

Nous, au RCD, avons toujours refusé cette confiscation de l’histoire. Car l’histoire de l’Algérie, c’est aussi celle des exclus de l’héroïsation d’État, des oubliés de la stèle et des monuments. C’est celle des militants de l’Étoile nord-africaine, des syndicalistes assassinés, des femmes combattantes qu’on a réduites au silence après la guerre. C’est celle du Congrès de la Soummam, trahi puis effacé dans certaines de ses vérités des livres scolaires. C’est celle de Larbi Benmhidi, exécuté sans jugement par l’armée coloniale, de Abane Ramdane, stratège de la Révolution, assassiné dans les ténèbres, victime des premiers crimes politiques post-indépendance. C’est celle de Krim Belkacem, de Mohamed Khider, de Mohamed Boudiaf, tous éliminés parce qu’ils croyaient que l’indépendance devait s’accomplir par la démocratie.

Il est scandaleux que les assassinats de figures nationales ou celle de nos frères Matoub Lounès,Hasni, Alloula, Medjoubi,assassiné à quelques mètres de ce lieu, soient encore couverts par le brouillard de l’impunité.

Et c’est aussi l’histoire plus récente : celle d’un peuple qui s’est levé en octobre 1988 pour briser le mur du parti unique. Une insurrection de la jeunesse, sauvagement réprimée, mais qui a forcé le pouvoir à concéder des libertés qu’il n’a jamais cessé depuis de grignoter.

Le RCD est né dans ce sillage. Non pas dans les salons du régime, mais dans la rue, dans l’appel de la liberté, dans la nécessité de donner un cadre politique à la volonté d’un peuple de vivre debout.

Notre mémoire, au RCD, est celle des luttes pour la vérité et la justice :

– Celle du printemps berbère de 1980, qui a brisé le silence sur l’identité amazighe.

– Celle des femmes qui ont dit non au Code de l’infamie en 1984.

– Celle des journalistes, des intellectuels, des militants assassinés dans les années noires par le terrorisme islamiste.

– Celle de 1988 qui a vu plus de 500 jeunes perdre leurs vies pour la démocratie.

– Celle des dérives sécuritaires du printemps noir de 2001, où 128 jeunes ont été tués par les forces de sécurité dans une Kabylie insurgée, révoltée, trahie.

– Celle aussi, très récente, du Hirak qui a vu des centaines de nos jeunes croupir dans les prisons arbitrairement.

Au RCD, nous n’acceptons pas que ces combats soient récupérés par ceux qui les ont combattus. Nous n’accepterons jamais que l’on transforme notre mémoire en vitrine d’un régime ou de ses sous-traitants en quête de légitimité.

Chaque deuil, chaque blessure, chaque trahison a renforcé notre serment de ne jamais accepter le mensonge comme base de la réconciliation nationale. De ne jamais troquer la mémoire contre le pardon imposé. De ne jamais céder sur la vérité au nom des fausses solutions.

Aujourd’hui encore, le pouvoir tente de reconfigurer le récit national. Il célèbre des figures qu’il a jadis combattues, il instrumentalise des dates, des martyrs, des symboles. Il décrète la mémoire par circulaire, il efface des noms, il construit des panthéons sans consultations. Cette falsification constante vise à faire croire qu’il est l’héritier légitime de toutes les luttes, alors qu’il en a été le fossoyeur méthodique.

Le RCD, quant à lui, n’a jamais été du côté des fossoyeurs. Nous avons toujours été du côté de la lumière, même dans la nuit. Du côté du peuple, même dans l’exil. Du côté de l’histoire, même quand elle nous blessait. C’est ce qui nous vaut d’être combattus, calomniés, infiltrés et tout récemment attaqués par les fossoyeurs des luttes en quête de repositionnements.

À ceux qui nous attaquent aujourd’hui, parfois de manière lâche ou anonyme, à ceux qui se sont tus pendant les tragédies et qui viennent faire la morale aux résistants, nous répondons ceci : nous avons affronté les balles, pas les rumeurs. Nous avons vu mourir nos amis, pas nos ambitions.

Nous ne courons pas après les vents, nous tenons le cap.

Oui, il y a un prix à payer pour être constant, libre, droit. Mais c’est ce prix-là qui fait de nous ce que nous sommes : un repère, un parti de mémoire, de dignité, de lutte et d’avenir.

Chers camarades,

Notre devoir n’est pas seulement de nous souvenir. Il est de transmettre. À la jeunesse désabusée, à celles et ceux qu’on a privés d’école et de repères, à ceux qu’on tente de séduire avec le fatalisme ou la haine de l’autre. Nous devons leur dire que la liberté n’est pas une chimère. Qu’elle a été portée par des hommes et des femmes de courage. Que l’Algérie peut s’en sortir, à condition de regarder son passé en face.

Le RCD poursuivra ce travail. Nous continuerons de dire les noms des oubliés. D’exiger la vérité sur les assassinats politiques. De porter la mémoire du combat démocratique sans la travestir. Nous continuerons de dire que l’histoire n’est pas finie, que l’avenir appartient à celles et ceux qui refusent la résignation.

Le RCD n’est pas une page tournée. Il est la plume qui refuse de tremper dans l’encre du mensonge. Il est la mémoire qui éclaire l’avenir. Et il sera la voix des sans-voix et des sans-archives pour faire barrage à ceux qui veulent imposer une mémoire sélective.

Nous ne sommes ni les gardiens d’un musée, ni les veilleurs d’un tombeau. Nous sommes les héritiers vivants d’un projet inachevé : celui d’une Algérie libre, plurielle, démocratique, enracinée dans toutes ses mémoires, tendue vers l’avenir.

Mesdames, Messieurs, chers camarades,

Préserver la mémoire, en Algérie, c’est d’abord rompre avec le monopole d’un récit unique, qui fige l’histoire, étouffe les vérités, et sert de caution à l’autoritarisme.

C’est refuser l’effacement délibéré de figures et de combats qui ne cadrent pas avec les dogmes du pouvoir. C’est rappeler que notre mémoire est plurielle : multilingue, libre penseuse, combattante et diversement enracinée dans les terres d’Algérie.

C’est dans cette logique que nous portons, avec détermination, la revendication de la réhabilitation pleine et entière du roi Aksel, figure de résistance et symbole de souveraineté. Sa statue, abattue dans le silence complice des autorités, doit être reconstruite. Non pas comme ornement, mais comme acte politique fort, de reconnaissance, de réparation et de mémoire.

Préserver la mémoire, c’est aussi enseigner l’histoire dans la vérité, inscrire toutes les langues nationales dans l’éducation, reconnaître les souffrances, et honorer toutes les luttes sans hiérarchie, sans tabou, sans oubli.

Car l’histoire n’appartient pas aux vainqueurs du moment. Elle appartient à ceux qui la vivent, la portent, la transmettent.

Au RCD, nous nommons les choses.

Nous appelons à la justice, à la reconnaissance et à la vérité.

Nous ne mendions pas la mémoire : nous l’assumons.

Et nous le disons haut et fort :

Pas de République sans mémoire. Pas de mémoire sans pluralisme. Pas d’avenir sans vérité.

Telle est notre ligne. Tel est notre combat. Telle est notre fidélité à l’Algérie de demain.

Merci pour votre attention.

Gloire à nos martyrs !

Gloire aux combattants de la liberté !

Vive la mémoire responsable !

Vive le RCD !

Alger, le samedi, 28 juin 2025

Atmane Mazouz

Président du #RCD

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