Discours d’ouverture du Secrétaire Général
au 2ème Congrès Ordinaire du RCD
– Palais des Nations – 26 et 27 Février 1998 –
Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs les Ministres,
Mesdames, Messieurs les Ambassadeurs,
Mesdames et Messieurs les invités,
Mesdames, Messieurs les journalistes.
Chers amis congressistes,
Bonjour,
Nous voilà réunis pour notre deuxième congrès ordinaire, neuf ans après notre congrès fondateur et six ans après notre congrès extraordinaire de 1991. Beaucoup d’événements ont marqué la vie nationale depuis. Événements auxquels notre formation a eu à faire face ou à s’adapter.
Issu des revendications d’après-guerre, notre Rassemblement se présente dans son expression, son expérience et sa composante comme un mouvement charnière.
– Charnière parce que fondé et porté par des acteurs qui, pour la plupart, ont vécu dans leur enfance la libération du pays et qui se trouvent donc à la jonction entre les artisans de cette libération et les générations montantes.
– Charnière parce que notre Rassemblement s’assigne comme objectif le développement démocratique en tant que prolongement naturel du combat libérateur.
– Rassemblement charnière enfin, puisque le RCD dit qu’il ne saurait y avoir d’avenir collectif viable, ni de stabilité sociale durable si l’homme et la femme dans notre pays ne sont pas égaux devant la Loi.
Refusant les querelles qui ont déchiré le Mouvement National et qu’il appartient à l’Histoire de traiter, le RCD, enregistrant la déclaration du 1er novembre 54 et inspiré par la prémonitoire plate-forme de la Soummam de 1956, se présente comme une formation imprégnée de la mémoire combattante, mais aussi installée dans le présent et projetée dans le futur.
Formation démocratique ayant formellement émergé après l’apparition officielle de la pluralité politique, le RCD est animé par des cadres militants qui ont derrière eux un long parcours dans le combat pour les libertés démocratiques, les Droits de l’Homme et les revendications identitaires à l’époque du parti unique.
Dès le départ, nous nous sommes astreints un double objectif :
– Animer le débat public dans une société stérilisée par la répression et mener un combat politique pour la conquête de l’électorat.
De ce fait, le militant du RCD, et compte tenu de la nature de la crise qui s’abat sur le pays, a été autant sollicité pour le soutien à la société civile dans ses différentes formes d’expressions et de revendications qu’il a eu à s’investir dans l’exécution de notre programme d’action et la construction de notre Rassemblement. Cette double exigence ne cessera jamais d’accompagner notre parcours.
En 1989, nous savions que nous n’avions pas choisi la voie de la facilité et nous savions aussi que nous n’avions pas le droit à l’erreur.
Choisir la démocratie en ces temps de confusion, de démagogie et de surenchère dans un contexte marqué par la faillite des uns, le renoncement de certains et la compromission des autres n’était pas chose aisée.
Que de fois n’a t-on entendu des voix se livrer à la surenchère dans l’opposition alors même qu’elles se taisaient au temps du parti unique, quand elles n’en sollicitaient pas les faveurs ou, que, plus directement, elles n’en faisaient pas partie.
Notre première victoire est alors d’avoir pu rester nous même, dans l’épreuve renouvelée et, parfois, dans l’isolement de l’incompréhension et de l’adversité. Ce que nous avons accompli en neuf années de combat a largement contribué à la préservation de l’entité nationale d’une part, et de l’ancrage populaire de la perspective démocratique d’autre part.
Tous les thèmes que nous avons lancés constituent désormais la substance du débat public. Ils inspirent et renforcent les principes qui fonderont demain la République : Laïcité, Identité, Droits de l’Homme, Égalité des sexes, Liberté de la presse, École républicaine, Justice sociale conjuguée à l’Économie de marché, Résistance citoyenne ; aujourd’hui, ces idéaux qui ont, avec nous, fait leur traversée du désert dans la tourmente, sont assumés par la société.
Celle-ci a, du reste, eu à nous exprimer son adhésion par la voie des urnes y compris dans les communes que l’on disait, jusque-là, définitivement acquises à la mouvance intégriste. Chacun sait que la fraude électorale et la censure affectent d’abord le RCD. Ce comportement du pouvoir révèle deux données politiquement déterminantes pour la compréhension des enjeux en cours.
- Le projet de société animé par notre Rassemblement est partagé par les milieux les plus larges.
- Le pouvoir ne veut pas, en tout cas pas pour l’instant, s’accommoder d’une alternative démocratique en phase ascendante.
Cet entêtement suicidaire à refuser de faire des choix stratégiques, proposer dans la transparence des alternatives consensuelles et clairement définies quant aux moyens à mettre en œuvre et aux objectifs à atteindre, a miné l’Algérie.
Aujourd’hui notre pays est exsangue. Terrain vague du tiers-monde, il offre l’image de la désolation, doublée de l’absence de perspective.
Le terrorisme sévit et atteint une jeunesse sous formée par une école livrée au fanatisme de l’extrémisme religieux. Pour fragiliser davantage la société, les intégristes ont ciblé prioritairement celles et ceux qui pouvaient produire et valider l’espoir et la liberté.
– L’économie est à ce point délabrée que les recettes du pays restent dominées par l’exportation quasi-exclusive des hydrocarbures, réduisant notre pays à un simple pipe-line.
En 1997, la croissance économique, nous le savons aujourd’hui, est négative. Au lieu d’en prendre acte et de rechercher courageusement et lucidement la manière d’en sortir, le gouvernement s’enlise dans la fuite en avant et le dogmatisme en recherchant les artifices par lesquels il pourrait annoncer deux à trois pour cent de taux de croissance. C’est de cette salle même que nous avions demandé le rééchelonnement de la dette extérieure en décembre 1989. On se rappelle du lynchage médiatique que nous avait réservé la presse gouvernementale. On connaît aujourd’hui les ravages de tant de folie aussi bien dans le monde du travail qu’auprès des cadres.
Les réformes économiques tardent à venir, étouffant ainsi l’initiative et sanctionnant la performance et la compétitivité.
– Socialement, jamais depuis l’Indépendance notre pays n’a connu autant de misère. Des poches de pauvreté absolue apparaissent chaque jour dans la société. Les maladies éradiquées à l’époque où je commençais à exercer en tant que jeune médecin réapparaissent. Quand les médicaments sont disponibles, ils sont inaccessibles. Le système de protection sociale est démembré et les retraités sont réduits à l’humiliation. La crise du logement s’accélère. Quand le gouvernement annonce à l’Assemblée qu’il pourra livrer 800.000 logements sociaux, nous savons qu’au mieux il en réalisera 50.000. Les couches moyennes à même d’amortir le désarroi social et de concevoir les solutions qu’attend le citoyen se sont effondrées. Comme pour briser tout espoir de reconstruction, près de 3.000 cadres sont en prison, pour certains, depuis des années, sans raison ni jugement. J’ai eu l’occasion de dire à ce propos que cette faute politique s’apparente à une deuxième bleuite qui nous rappelle que la démagogie sanglante qui a ruiné le Mouvement National continue de sévir.
Les anachronismes et l’esprit dogmatique de l’époque du parti unique sévissent toujours.
– Mais le pire de tout c’est le sinistre de l’école avec sa contre-éducation qui produit la haine de soi et le rejet de l’autre, et, en bout de cursus, l’incompétence et l’exclusion sociale. L’Algérie paie aujourd’hui la décision qui a transformé l’éducation nationale en un gigantesque commissariat politique. Par ailleurs, la remontée effarante de l’analphabétisme ne semble pas préoccuper nos dirigeants.
Lors de l’un de mes derniers passages en Europe, je découvrais cette donnée. Dans les grandes écoles européennes, la fréquentation algérienne, comparée à nos voisins maghrébins, est de l’ordre de 1 pour 20 en défaveur de nos compatriotes. L’avenir de la haute administration est, pour l’instant, bien compromis.
Sur la scène internationale, l’image du pays se dégrade quotidiennement. La voix de l’Algérie se limite à des dénonciations récurrentes de l’ingérence livrant l’espace diplomatique à la propagande intégriste.
Refus d’évaluation critique, absence de perspectives, fraudes électorales, corruption généralisée et désinformation, voilà les ingrédients du malheur algérien. Voilà les artifices par lesquels le régime compte se maintenir. Cela fait 30 ans que cette recette est testée à nos dépends. Il faut en sortir. C’est une question de survie nationale.
Il est inutile de continuer les litanies des occasions manquées et des agressions répétées contre le destin algérien. Les avertissements n’ont pas manqué; les initiatives et les propositions à même d’éviter le pire au pays non plus.
Nous voyions déjà arriver le malheur à travers la manipulation politicienne de la religion en 1989. La problématique de la laïcité s’imposait à toute formation soucieuse de prévenir, ou, à tout le moins, de contenir le fléau intégriste. Nous avions été seuls et nous le demeurerons longtemps à vouloir réhabiliter un principe majeur dans la société qui a toujours attribué la responsabilité de la cité à une personne autre que celle chargée la gestion du culte. En dépit d’un handicap de communication réel, nous n’avons pas cédé au terrorisme intellectuel. Pour nous le patriotisme ne doit pas attendre d’être majoritaire pour se manifester.
Contentons-nous simplement de constater que les sursauts de sauvegarde nationale sont systématiquement venus en dehors du régime, et, souvent, contre sa volonté. L’espoir algérien est aussi têtu à se révéler à la moindre occasion que l’est la détermination du régime à le briser.
Dans ce combat qui a opposé la loyauté à l’abus, le patriotisme au clientélisme, l’espérance au cynisme, le RCD a eu à assumer sa mission partisane en tant que force de contestation et son devoir national en tant que force de proposition. Nous n’avons jamais été dupes. A chaque fois que notre intervention a contribué à sauver l’Algérie, nous étions bien conscients de ce que le pouvoir pouvait en tirer comme profit.
Néanmoins, nos préoccupations militantes ne nous ont jamais fait perdre de vue notre mission d’animation civile.
- La marche historique du 10 Mai a rassemblé, pour la première fois, dans la convivialité et la détermination les forces populaires de la démocratie, c’était, pour l’essentiel, le RCD.
- La Conférence Nationale des Démocrates, première initiative de convergence démocratique, en juillet 1990 déjà, c’était le RCD.
- Les 8 + 1, tentative d’unification de tout ce que comptait le pays comme formations à base démocratique minimale se sont réunis suite à notre appel.
- Le Mouvement Pour la République (MPR), qui avait réuni cinq mille cadres patriotes engagés dans la sauvegarde de l’état républicain, au pire moment du terrorisme et de la compromission, était inscrit dans la dynamique d’un mouvement d’opinion où l’action de nos militants était essentielle.
- L’appel à la résistance quand la population subissait les agressions criminelles des intégristes et la démission d’un pouvoir qui n’osait ni défendre le citoyen ni assumer sa défaillance, c’était nous.
Aujourd’hui, tout le monde se réclame de cette résistance et, en tout cas, tout le monde en mesure le rôle dans la préservation de vies humaines et, plus généralement, la défense de l’Algérie.
Notre Rassemblement s’est imposé rigueur et constance dans un climat dominé par la surenchère et le populisme. N’ayant rien à prouver en matière d’opposition, le RCD a simultanément dénoncé la régression-répression du système et initié ou participé à toutes les initiatives de construction démocratique.
Il en fut ainsi lors de l’arrêt du processus électoral, en 1991, où le RCD fut la seule formation politique à assumer l’impopularité d’une action, reconnue aujourd’hui comme un acte décisif de sauvegarde nationale.
Lorsque l’élection présidentielle de novembre 95 s’est présentée, nous nous sommes engagés dans la compétition tout en connaissant la façon dont est préparé et géré un scrutin dans notre pays. Laisser en 95 un candidat du régime et celui de l’intégrisme aller seuls à cette élection aurait vraisemblablement provoqué une désaffection réelle. A commencer par l’émigration, dont la ferveur patriotique, avait constitué le vrai déclic dans la mobilisation de l’électorat.
Un absentéisme important à cette occasion aurait été inévitablement récupéré par ceux qui avaient décidé que «80% des Algériens avaient définitivement opté pour le projet islamo-conservateur en 1991 ». Les conséquences pour l’Algérie et le Maghreb devant un tel scénario sont faciles à imaginer. Une fois de plus le devoir patriotique et la sauvegarde de l’état républicain commandaient, dans le contexte interne et externe de l’époque, de participer à ce processus.
Il fallait être là, se battre à armes inégales, certes, mais porter résolument le message démocratique pendant toute la durée de la campagne et témoigner que nous n’avons pas renoncé à faire triompher les idéaux par lesquels notre peuple a été le symbole de la décolonisation.
Lorsqu’est venu, durant l’été 96, la conférence dite «de l’Entente Nationale », le RCD a participé aux débats en soumettant quatre propositions dont il était convenu qu’elles devaient être prises en compte dans les processus de révision de la Constitution. Il s’agissait de :
- La mise à l’abri de la religion des manipulations politiques.
- La prise en compte constitutionnelle de l’ensemble des paramètres constitutifs de la personnalité nationale qui ne peut être que le produit d’une identité de synthèse.
- La définition de la mission républicaine de l’école.
- La constitutionnalisation de la liberté d’expression et la mise en place d’un conseil indépendant de l’audiovisuel.
Admises dans le débat, ces propositions ont été évacuées dans les procès-verbaux de séance. Le ton général des articles soumis à amendement, dominé par le conservatisme, reflétait les véritables rapports de force à l’intérieur du système. Le RCD ne pouvait cautionner, plus longtemps par sa présence, une constitution où les reculs relayaient les ambiguïtés. En stipulant qu’il est interdit d’utiliser la religion à des fins politiques, la Constitution algérienne énonce, de façon honteuse, mais énonce quand même, un principe laïque sans en assumer les implications puisque, dans une autre disposition, la même Constitution invoque la morale islamique dans toute entreprise politique.
Les préparatifs du référendum comme la fraude qui en a sanctionné les résultats montrent que les décideurs, faisant subir une véritable noria aux institutions, sont plus soucieux des équilibres qui rythment la vie du sérail que de la mise en place d’instances pérennes à mêmes de garantir l’émancipation démocratique du pays.
Lors des élections législatives et locales, le RCD, en dépit de l’acharnement de l’administration à empêcher son expression et son redéploiement, s’est imposé une fois de plus la participation. Tout le monde sait aujourd’hui que notre Rassemblement a été la formation la plus durement sanctionnée par les fraudes électorales. Mais même les partis les plus farouchement opposés à toute participation électorale se sont finalement décidés à s’impliquer dans ce processus.
La gestion de ces différentes étapes a légitimement déçu beaucoup de citoyennes et de citoyens qui attendaient, devant le malheur qui s’est abattu sur le pays, un peu de responsabilité et de retenue de la part du pouvoir. Mais des acquis substantiels ont été enregistrés à chaque échéance. Et c’est la somme de ces petits pas qui ont irrigué l’espoir qui nous anime aujourd’hui.
- Le MPR qui a vu, dans les huit mois qui ont suivi sa création, six de ses membres fondateurs agressés ou tués, après la flambée du terrorisme qui a marqué le début de l’année 94, a montré que les cadres algériens, même non structurés dans les partis, pouvaient se mobiliser lorsqu’il leur est fait appel autour d’un projet clair et cohérent.
- La constitution du Haut Commissariat à l’Amazighité, en dépit des reniements des autorités qui ont suivi la promulgation du décret présidentiel, reste une étape décisive dans la vie institutionnelle algérienne ; puisque, pour une fois, une structure officielle est mise en place en réponse à une revendication citoyenne et non selon des impératifs d’équilibre du pouvoir.
- La révision de la Constitution, même à travers les termes ambigus de ses articles, admet formellement que le nœud gordien de la crise algérienne renvoie au principe de laïcité.
- Les élections législatives, avec tout le scandale qui les a marquées, ont révélé l’écho rencontré par le message démocratique dans les couches populaires. Désormais, nous savons que l’extrémisme religieux n’est pas le seul canal capable de comprendre et de drainer le mécontentement populaire puisque le RCD s’est imposé à Bab-El-Oued, la Casbah, Belcourt, Kouba, etc… A chaque fois que l’expression libre est à peu prés acquise comme c’est le cas dans l’immigration ou les grands centres urbains, l’aspiration démocratique renaît et s’impose.
- Lors de la protestation initiée avec d’autres partis en octobre et novembre passés, à l’occasion des élections locales, la nature des slogans et les objectifs, même conjoncturels, qui avaient fédéré l’opposition exprimaient une évolution essentielle dans la formulation et la légitimité du discours politique. Tous ont souscrit à l’exigence de l’impartialité de l’administration, tous ont revendiqué le respect des valeurs républicaines de l’Etat, tous ont assumé publiquement la perspective démocratique dans notre pays.
D’aucuns ont signalé, à juste titre, qu’il ne fallait pas être trop naïf au point de croire à la sincère et définitive mutation de partis intégristes, au motif qu’ils ont changé de discours le temps d’une protesta.
Sans doute ont-ils raison.
Mais en la circonstance, est-il vraiment indifférent de noter le fait que des partis qui se réclamaient de la théocratie aient été amenés à abandonner les principes cardinaux de leurs formations même le temps d’une protestation ?
Est-il indifférent de relever que, pour être crédibles et entendus aujourd’hui, des partis qui, il n’y a pas si longtemps, avaient décrété que la démocratie était kofr «hérésie » se réclament de cette même démocratie.
Chers amis,
La fatalité de l’extrémisme religieux ne s’imposera plus à l’Algérie de Novembre et de la Soummam.
L’hypothèque intégriste ne pèsera plus sur le destin algérien même si des effets induits de ce fléau continuent encore à endeuiller le pays.
Il y a eu deux grandes phases dans notre long et difficile combat :
– La conceptualisation de l’ambition démocratique et sa lente maturation qui a occupé les années 70 et les années 80.
– L’expression publique de cette ambition qui s’est imposée dans la société dans un deuxième temps dans les années 90.
Nul, du pouvoir aux intégristes, n’ose désormais inscrire sa démarche en dehors du champ démocratique. Nous avons inversé les repères qui légitiment, devant le peuple, le débat public. Cela est capital. Nous l’avons fait les mains nues, avec pour seul viatique notre détermination, l’amour de notre pays et le souci de l’avenir de nos enfants.
S’ouvre devant nous, maintenant, la troisième et ultime étape de notre lutte. Projeter dans les institutions l’ambition démocratique revendiquée et assumée par le jeune, la femme, le travailleur de l’usine ou de la terre, l’opérateur économique ou l’intellectuel.
Du travail reste à faire. Beaucoup de travail reste à faire.
Ne sous-estimons pas, cependant, les amorces d’intégration démocratique institutionnelles, que nous avons pu arracher.
– Même réduite à la symbolique par la fraude, et le RCD en est la première victime, l’Assemblée Nationale algérienne est plurielle.
– Même soumise aux pires des tracas, la presse indépendante reste un témoin vivant d’une libre expression qu’il sera très difficile de remettre en question.
– Même tenue en suspicion et ghéttoïsée, l’école privée est en train de préfigurer la restructuration du système éducatif de demain, aidant ainsi à valoriser le travail héroïque des enseignants de l’école publique qui n’ont pas voulu céder à la dérive ambiante.
– Même dominée par les réseaux occultes, la concurrence qui touche la sphère économique dans certains cas, imposera, à terme, à tout opérateur rationalité, imagination et performance.
D’autres exemples timides ou embryonnaires, certes, peuvent être encore cités. Mais leur multiplicité et la diversité de leurs origines attestent qu’ils représentent un faisceau d’initiatives qui convergent tous vers la matrice démocratique. Tous sont inspirés par l’audace et l’intelligence, tous sont animés par la volonté de réussir dans une légalité respectée par chacun, tous visent à arracher plus de liberté dans la production, l’expression ou l’éducation.
Nous comprenons l’impatience de nos concitoyens. Nous partageons leur amertume lorsqu’ils évoquent le nombre d’occasions perdues et le prix payé par notre peuple pour des choix dont il n’est pas responsable. Mais il se trouve que notre parcours nous a appris à ne jamais désespérer, à ne jamais renoncer. D’abord, parce que nous n’avons pas de pays de rechange, ensuite parce que nous avons eu à nous battre dans des conditions difficiles pour des causes réprimées, rejetées et condamnées et qui se sont ultérieurement avérées être les sources les plus sûres pour l’espérance algérienne.
Aujourd’hui, tout le monde dit que le RCD a vu juste. Essayons de convaincre que, désormais, le RCD avec d’autres forces convergentes, peut mieux gérer le pays.
Mes chers amis,
Le combat a été difficile. Il n’est pas achevé. Mais soyons sûrs d’une chose : Le pire est derrière nous. Mais dans cette résurrection nationale, autorisons-nous la légitime fierté de ne pas avoir été les derniers à nous mobiliser pour la sécurité, la stabilité et l’honneur de notre pays. Voilà pour ce qui est de l’aspect politique de notre bilan ces dernières années.
S’agissant de l’aspect organique, le RCD a subi, plus que tout autre formation, les contraintes de la conjoncture qui affecte le pays. Placé sous le tir croisé des assassinats intégristes et de la répression du pouvoir, nos militants n’ont pas eu la tâche facile.
Cent vingt deux de nos militants ont été assassinés, souvent dans des conditions de barbarie extrême. Des centaines d’autres ont vu leur vie perturbée pour des raisons sécuritaires ou leur situation professionnelle sanctionnée à cause de leur appartenance au RCD. Combien d’autres militants n’ont pu faire valoir leurs droits à la suite de rétorsions de l’administration, combien ont vu des redressements fiscaux s’abattre sur eux au motif qu’ils ont prêté un local ou participé à une quête pour le Rassemblement pendant une campagne électorale, combien ont été arrêtés arbitrairement parce qu’ils ont suivi les mots d’ordre de leur formation comme ce fut le cas pendant le référendum sur la révision de la Constitution. On imagine bien que dans de telles conditions, il n’était pas facile pour les structures du Rassemblement d’activer et encore moins de se redéployer.
Mais en dépit de ces risques et contraintes, le RCD revendique la fierté d’avoir été le seul parti politique algérien à tenir, à échéance régulière, les sessions de son Conseil National qui est l’instance souveraine entre deux congrès. Bien sûr, ces sessions n’ont pas toujours drainé la participation souhaitée. Mais les faibles ressources financières du parti et des militants, les difficultés de communication, les conditions de sécurité, comme les pressions de l’administration qui s’exercent lors des absences des membres du conseil n’ont pas empêché cette instance de débattre et de délibérer. Il reste, et cela doit être dit, que nous n’avons pas toujours répercuté à temps les résolutions et autres positions du Rassemblement sur la base pour y être commentées, analysées et reprises dans l’environnement du militant en temps opportun.
Instance souveraine du RCD, il appartiendra à ce congrès de faire émerger dans la nouvelle structure les cadres qui ont la volonté, la capacité, mais surtout, la disponibilité à assurer leur mission d’animation et d’orientation.
Plus généralement, ce congrès aura à débattre sur le profil organique du parti pour les prochaines années, compte tenu à la fois de la situation particulière que vit le pays (mutations politiques et économiques, insécurité, contraction des revenus, etc…) et, compte tenu aussi, de ce qui est attendu du RCD par des franges de la population de plus en plus larges.
- Faudra-t-il structurer le Rassemblement de telle sorte à absorber toutes les sympathies dans les instances organiques ?
- Faut-il mettre en place une organisation plus légère à l’écoute de l’ensemble des catégories sociales qui se reconnaissent dans notre projet ?
Les débats qui ont eu lieu ces dernières semaines à la base et lors des pré-congrès ont ouvert quelques pistes. L’une des missions de cette assemblée est d’approfondir cette question.
Par ailleurs, la question du financement de nos structures devient capitale.
Il m’a semblé, à l’occasion des deux pré-congrès auxquels j’ai assisté, qu’il y avait une certaine gêne à exprimer clairement les besoins financiers des instances locales et régionales du Rassemblement. Nous devons impérativement mobiliser les ressources financières qui nous permettront de nous doter des moyens nécessaires à l’accomplissement de notre mission. Le RCD de 98 a une vocation plus large et plus complexe que celle de 91. Nous avons besoin de locaux et de matériels. Il nous faut, au minimum, et à première estimation, une centaine de permanents. Nous aurons à devoir financer des regroupements périodiques si l’on veut que la communication et la formation internes soient fiables et soutenues pour assurer à nos messages la meilleure audience possible dans la société.
Jusque là, le crédit du RCD a pu substantiellement peser sur la scène internationale à chaque fois que les forces démocratiques ont eu à intervenir pour enrayer les effets de certaines actions animées par les relais de l’extrémisme religieux ou de partisans du soutien au pouvoir. Il faudra désormais plus de présence à l’extérieur du pays, ce qui implique aussi plus de moyens. Pour préserver son autonomie stratégique, le RCD n’a, à ce jour, pas reçu le moindre centime de la part d’organisations, partis ou Etats étrangers. Et, hormis, les subsides allouées aux formations politiques participant aux échéances électorales, dont une bonne partie sert à financer le congrès d’aujourd’hui, notre Rassemblement n’a eu à compter que sur les participations de ses militants et sympathisants. Les cotisations, vous le savez, ont été très irrégulières, et les laborieuses souscriptions ne suffisent même pas à couvrir les dépenses des instances locales. Le bilan financier, disponible au bureau, est soumis à l’appréciation de ce congrès.
Nous devons nous persuader que c’est de notre capacité à trouver les moyens financiers que dépend, pour une bonne part, la réussite de notre mission.
Venons-en maintenant à la manière d’appréhender le futur immédiat pour réhabiliter l’Etat, la citoyenneté et la nécessaire stabilité sociale, préalables à la réalisation de tout projet soumis à débat contradictoire. Nous avons eu à dire auparavant que l’un des plus grands acquis de notre lutte et d’avoir levé l’hypothèque intégriste sur le pays.
L’expérience de Mohamed Boudiaf (Llah Irrahmou), même brisée, même avortée reste un témoin majeur des potentialités que recèlent l’Algérie.
Sans pouvoir formel, sans hommes autour de lui, sans la connaissance d’un terrain qu’il a dû quitter pendant une trentaine d’années, Boudiaf a pu en six mois :
- Déconnecter la jeunesse de la tentation intégriste. Chacun donnait cette catégorie sociale comme définitivement acquise à l’extrémisme religieux, tant le désespoir et le scepticisme l’avaient rendue réfractaire à toute sollicitation positive.
Depuis l’indépendance, la jeunesse est proclamée «l’avenir du pays » comme pour mieux l’exclure de la décision actuelle. Lors des pré-congrès de la région Centre, un jeune étudiant a eu cette fabuleuse formule «nous ne voulons plus figurer dans le discours de la classe politique, mais être dans la classe politique ».
Pendant l’élection présidentielle de 1995, je m’étais engagé en faveur d’un plan Marshall pour la jeunesse. En tout état de cause, la crise algérienne ne peut connaître de solution durable si une politique globale n’est pas menée en faveur de la jeunesse.
- En six mois Boudiaf a pu mobiliser les forces vives du pays autour d’un projet de société qui identifiait les vrais problèmes et préconisait les solutions qu’ils appelaient : L’école, le statut de la femme, la liberté de la presse, la soustraction de la religion du champ politique, l’économie de marché, la construction maghrébine, la revendication de l’espace méditerranéen ont constitué les premiers repères sur lesquels il avait articulé son projet de Rassemblement. Et l’écho fut quasi instantané. Beaucoup d’observateurs avaient noté, fort justement, à l’époque que notre projet recoupait le sien. Ce qui lui a fait dire : « J’étais au RCD avant sa création ».
A ceux qui sont pressés de nous voir nous impliquer aujourd’hui dans le gouvernement, nous répondons qu’il ne s’agit pas pour nous d’une fuite de responsabilité. La situation n’était pas plus facile avec Boudiaf, mais le cap étant clairement déterminé, nous étions prêts à nous engager à ses côtés.
Chers amis,
Notre projet commun est aujourd’hui réhabilité. Il s’agit de fédérer toutes les énergies capables de le concrétiser.
C’est le but fondamental de ce congrès inspiré par et organisé pour la convergence démocratique.
Nos listes électorales ont été ouvertes à des personnalités ou des militants convaincus de la nécessité et de la réussite du projet démocratique en Algérie. Des cadres politiques, souvent issus des mêmes sources revendicatives pendant les années de plomb, et qui ont, pour diverses raisons, emprunté chacun son chemin, en sont venus à se retrouver et à reprendre le combat initialement conçu dans la solidarité. C’est cela la convergence.
A toutes celles et, à tous ceux qui veulent que cesse le malheur et renaisse enfin la légitime aspiration à reconstruire notre beau et grand pays dans la paix, la liberté et le progrès, nous disons que :
- Il y a aujourd’hui beaucoup de citoyens qui rejettent l’extrémisme religieux en Algérie. Une majorité écrasante d’Algériens vit dans la fraternité et la tolérance, sa religion. Cette majorité se reconnaît dans le combat démocratique.
- A toutes celles et à tous ceux qui veulent assumer leur autonomie à l’égard des extrémistes religieux et du pouvoir, nous disons qu’indépendamment de ce qu’il y aura à faire avec les uns et les autres ultérieurement, nous serons d’autant plus forts et crédibles si nous sommes d’abord réunis entre nous.
Pour nous, la seule condition à mettre à cette convergence démocratique est l’autonomie de notre vaste et généreux mouvement à l’égard des deux factions politiques qui ont, chacune à sa façon, mais chacune suppléant l’autre, mené le pays à l’impasse qui l’endeuille aujourd’hui. Les contacts ou les compositions ultérieures sont nécessaires voire incontournables. Ils doivent suivre et non précéder la convergence.
Cette initiative est :
- Vitale, parce qu’elle détermine la survie de l’Algérie en tant qu’Etat, Nation et société.
- Faisable, puisqu’elle dépend de notre seule volonté.
- Attendue, parce qu’elle répond à une aspiration qui a longtemps mûrie à travers les luttes successives que nous avons menées.
Cette opportunité historique sera d’autant plus facilitée, si nous avons à l’esprit les évolutions qui marquent notre environnement international. Et qu’il me soit permis de dire quelques mots à ce sujet.
La politique étrangère est la recherche permanente de la meilleure façon de défendre et de promouvoir les intérêts nationaux, en particulier dans des domaines tels que la sécurité nationale, l’autonomie de décision et la prospérité économique.
Dans la gestion de la crise multidimensionnelle que traverse l’Algérie, la politique étrangère du régime n’a pas joué, loin s’en faut, le rôle dynamique qui aurait dû être le sien.
Ainsi, pour ce qui est de notre sécurité nationale, notre politique étrangère a été victime de l’attitude ambiguë et des atermoiements du pouvoir à l’égard de l’intégrisme sur le plan interne. La confusion et les hésitations face au phénomène intégriste ont dérouté nos partenaires.
L’absence d’une stratégie offensive et l’absence criante de ligne politique ont contribué à donner l’impression que le pays se détermine en fonction des perceptions que se font de lui ses partenaires. Ce qui a amené à cette diplomatie réactive où l’invective tient lieu de comportement.
Sur le plan des relations économiques, le retard accusé par le gouvernement à conclure un accord de rééchelonnement de notre dette extérieure a considérablement aggravé la crise qui frappe notre pays depuis plus d’une décennie. Si cet accord était intervenu plus tôt, comme le RCD a été le premier et pendant longtemps le seul à le demander, des résultats plus positifs auraient été enregistrés en matière d’ajustement structurel. Les hésitations qui continuent de marquer la mise en œuvre des réformes économiques, notamment pour ce qui est des privatisations grèvent sensiblement la relance de notre économie.
Dans les circonstances particulièrement cruciales que traverse notre pays, une politique étrangère jouant le rôle déterminant qui doit être le sien au service d’une stratégie globale de sortie de crise devrait contribuer à atteindre trois objectifs essentiels.
– Il s’agit d’élargir et de décentraliser les espaces de solidarité et de dialogue politique à même de desserrer les contraintes nombreuses qui pèsent sur notre pays. Les visites récentes d’intellectuels, d’hommes politiques et de parlementaires européens ont montré qu’un dialogue franc et loyal est de nature à dissiper les malentendus et à fournir à nos partenaires une image fidèle de la crise que traverse notre pays et de notre détermination à la surmonter. Le début de mobilisation de l’opinion internationale, notamment en Europe, à laquelle le RCD a contribué activement, devrait inciter nos partenaires à rectifier progressivement leurs appréciations des données et des enjeux de la crise algérienne.
– Par ailleurs, nous pouvons lutter efficacement contre le phénomène terroriste par la promotion, avec nos partenaires, d’une coopération régionale et internationale crédible en la matière.
– Enfin, il est capital de moderniser notre appareil économique en vue de permettre à notre pays de négocier au mieux son insertion dans une économie mondiale en pleine mutation. A cet égard, les changements profonds introduits dans l’économie internationale par la mondialisation des marchés, la rapidité des transactions financières et la révolution informationnelle, devraient retenir toute notre attention et peser dans nos choix de politique étrangère.
Compte-tenu de ces considérations, notre politique étrangère devrait :
a) Au Maghreb, être orientée vers le déblocage de la dynamique maghrébine en vue de permettre aux peuples de cette région d’affronter, unis, les défis historiques qui leur sont lancés par la construction d’un ensemble euro-méditerranéen au sein duquel ils peuvent jouer un rôle de premier plan en raison de leurs ressources et de leur emplacement stratégique entre l’Europe et l’Afrique. Je disais dans cette même salle, en 1989 que, telle que conçue, l’UMA me semblait être plus « un syndicat de chefs d’Etat » qu’une construction régionale à même de fédérer des peuples que tout rapproche. Il y a donc lieu de libérer l’édification maghrébine du monopole des Etats pour en faire aussi une entreprise vivante ouverte aux acteurs de la société civile. Les avancées réelles des valeurs démocratiques dans la région au cours des dernières années constituent un autre atout de nature à accélérer cette dynamique de construction du Maghreb des citoyens.
b) Avec l’Europe, et en particulier avec l’Europe méditerranéenne, mettre fin au déséquilibre anormal existant depuis longtemps entre, d’un côté, des relations économiques et culturelles significatives avec cette région et, de l’autre, un dialogue politique réduit à sa plus simple expression. Il est temps, à cet égard, d’en finir avec la crispation, la méfiance et aussi les malentendus et les ambiguïtés qui caractérisent trop souvent nos relations avec l’Europe, pour engager, dans une relation adulte, avec cette région qui constitue, à côté des États-Unis et de l’ensemble Chine-Japon, l’un des trois pôles d’intégration du XXIe siècle.
c) Avec l’Afrique, il convient d’enregistrer, pour s’en féliciter, les avancées réelles de la démocratie dans plusieurs pays qui ne manqueront pas de libérer les potentialités économiques et culturelles immenses des peuples de notre continent. L’expérience de l’Afrique du Sud, en la matière, est riche d’enseignements. L’Algérie, dont la dimension africaine a toujours été significative, devrait renforcer sa présence dans une zone qui commence à connaître de profondes évolutions.
d) Au Moyen-Orient, l’Algérie, peut, de par son identité, son histoire et son capital démocratique jouer un rôle de premier plan dans le développement de relations nouvelles avec une région, hélas, encore dominée par le conservatisme et les autoritarismes.
L’émancipation démocratique algérienne aura un impact politique mais aussi pédagogique bien au-delà de nos frontières. Aujourd’hui l’espoir démocratique suscité par la révolution palestinienne est mis à mal par les entraves que connaît le processus de paix. Le combat résolu des démocrates Algériens peut aider les forces de progrès du Moyen-Orient à s’émanciper des pesanteurs qui contrarient leurs légitimes aspirations à plus de progrès et de liberté.
Certains de nos amis de l’étranger ont cru, de bonne foi, qu’il fallait faire pression sur le gouvernement pour l’amener à dialoguer avec les intégristes. Nous avons toujours dit que le pouvoir n’a pas attendu les pressions pour passer le compromis islamo-conservateur. Au demeurant, la démarche n’a pas permis de résorber le terrorisme. Si pression sur le pouvoir il doit y avoir, autant qu’elle se fasse en faveur d’un dialogue avec les démocrates.
Chers amis,
Nous sommes dans un congrès. Notre objectif est d’adapter nos statuts, de préciser notre stratégie et d’élire une nouvelle direction. Cela nous concerne en tant que militants. Mais ce n’est pas un hasard si c’est le terme de Rassemblement qui a été retenu dès la création pour désigner notre formation.
Nous savions au départ que la classe politique nationale aura à innover, évoluer et se recomposer. Cette exigence s’impose plus que jamais. Des initiatives politiques fortes devront être prises dans l’urgence.
La vanité du régime à vouloir se maintenir en l’état est aussi illusoire que dangereuse.
Toutes les formules ont été essayées avec les résultats que l’on sait.
Le parti unique a dilapidé le capital du combat libérateur et le crédit de l’Etat.
La tentation intégriste a failli dérouter notre destin national.
La composition des deux continuent d’ensanglanter le pays.
C’est dire qu’on ne peut pas sauver l’Algérie et sauver le régime. Tout le problème aujourd’hui en Algérie c’est de convaincre qu’une évolution est inéluctable. Celle-ci se fera de façon ordonnée vers la démocratie ou vers plus de désordre avec le risque de voir le pays imploser.
La société algérienne a mis en échec le péril intégriste. C’était un préalable fondamental à l’émancipation démocratique.
La convergence démocratique à laquelle nous appelons est accompagnée par une meilleure perception de la force et du crédit de l’ambition démocratique algérienne sur la scène internationale. Cela est important. Mais, l’essentiel est en nous : dans notre mémoire et nos valeurs.
Chers amis,
– Il y a cinquante ans de cela le peuple algérien s’engageait, seul, dans un périlleux combat pour son indépendance. Beaucoup, à l’époque, disaient que l’ordre colonial était un moindre mal pour nous quand il n’était pas carrément recommandé comme la seule voie à même de nous libérer d’atavismes et de traditions archaïques.
– Aujourd’hui aussi, notre peuple s’engage, seul, dans le périlleux combat pour la démocratie.
Beaucoup nous suggèrent de nous soumettre au fatalisme de l’extrémisme religieux au motif que la démocratie serait inadaptée à notre personnalité trop marquée par les mêmes atavismes et traditions archaïques.
– Il y a cinquante ans de cela nos aînés, par leur détermination, ont brisé l’isolement, dépassé l’indifférence et vaincu l’adversité. Au nom des militants du RCD, je salue la délégation de la Fédération de France du FLN qui fut pour nous pendant longtemps un exemple de synthèse du patriotisme et de modernité.
Sans être tout à fait de même nature, le combat d’aujourd’hui s’avère être d’une plus grande importance puisqu’il engage l’existence même de l’entité algérienne.
A la Soummam en 1956, des patriotes ont formulé l’espoir de voir l’Algérie se réaliser dans un état démocratique et social.
A l’aube du troisième millénaire, nous avons à transformer leur espoir en volonté et parachever le combat libérateur qu’ils ont livré par l’émancipation démocratique de notre pays.
Il y a cinquante ans, l’Algérie a été le fer de lance dans la décolonisation.
Il est attendu de nous de relever un défi aussi grand que celui de nos aînés : La construction de la première démocratie dans un pays musulman récemment décolonisé.
Puisse ce congrès être déterminé et généreux dans ses ambitions, réaliste dans sa stratégie et solidaire dans sa démarche.
Je vous remercie.
Vive l’Algérie libre et démocratique.
Gloire à nos martyrs.
Alger, le 26 février 1998