Un redécoupage administratif pour le renouveau national

 

                             Le redécoupage de l’espace algérien 

L’aménagement du territoire est au cœur de toute politique de régionalisation. Le découpage en régions de l’espace national, au-delà de son aspect technique, engage inéluctablement l’avenir des groupements humains vivant sur les espaces ainsi identifiés. Si le déterminant principal demeure la viabilité économique du territoire nouvellement défini, d’autres considérants ne sont pas négligeables pour autant ; éléments historiques, socioculturels, ensembles géographiques homogènes, structurant des rapports à l’espace, un vécu, des identités…

Pour des raisons historiques et symboliques évidentes renvoyant à la révolution, les schémas originels des wilayates historiques est une référence qui, actualisée et adaptée aux nouvelles conjonctures constitue un cadre de réflexion dont il convient de remanier les contours, d’affiner la portée pour mieux appréhender les nécessités de l’heure (économiques, socio-historiques ou géographiques).

                              Le découpage proposé

  • Les grandes régions économiques

REGION I

Wilaya I (Les Aurès) : elle marque de façon massive et prégnante la partie méridionale de l’ancien Constantine. La région associe des paysages d’une grande diversité : hauts plateaux arides que cisaillent des gorges profondes (lits d’oueds) aux écoulements parfois pérennes ou plus simplement troués de cuvettes d’eaux salées. Il y a des massifs (mont du Tandra, du Belezma, de l’Aurès, des Nememchas), montagnes relativement arrosées sur les versants d’exposition Nord. Ces versants dominent des dépressions, chotts et palmeraies sahariens au sud. Son unité tient d’une société profondément agraire, dont les membres ont développé des liens d’une grande solidarité au niveau communautaire tant dans le pays que dans l’émigration.

REGION II

La wilaya II (le nord constantinois) : Elle s’étend sur un espace plus petit que la première; elle abrite la capitale régionale (Constantine). Des villes côtières, Annaba et Skikda au tissu industriel et urbain conséquent lui garantissent une certaine prospérité, tandis que les hauts plateaux de Sétif à Guelma mais aussi les hautes plaines constantinoises céréalières lui assurent un approvisionnement régulier en produits agricoles de large consommation. Les monts d’El Kala, de l’Edough et l’immensité forestière de Taref lui offrent une pluviométrie importante.

REGION III

La wilaya III (Kabylie) : géographiquement, la wilaya III historique s’étendait de Boumerdes à Aokas. Limitée au nord par la méditerranée, elle inclut, à l’est, des territoires rattachés aujourd’hui à la wilaya de Sétif et de Bordj Bou Arreridj. Elle est bordée au sud-ouest par les espaces de Bouira, Sour-El-Ghozlane et le finage de Boussaâda.

La Kabylie ci-dessus désignée est en fait un bloc de montagnes escarpées, disséquées par des rivières et cours d’eau d’importance variable qui se fondent au sud dans la partie méridionale du centre des hauts plateaux. La région possède une grande homogénéité culturelle que les traditions migratoires anciennes n’ont pas altérée.

REGION IV

(L’Algérois) : elle comporte des espaces très marqués par la colonisation (vastes fermes coloniales et noyaux urbains fort développés), où l’agglomération algéroise se singularise, autant d’ailleurs que la plaine de la Mitidja et celle, plus vaste, de Chélif qui ont bénéficié de grands travaux de mise en valeur. Ensembles séparés par des alignements montagneux aux altitudes relativement modestes (Monts de Blida et du Dahra, massif de l’Ouarsenis), la richesse agricole de ses terroirs (envahis malheureusement de nos jours par le béton et l’urbanisation effrénée), la densité du peuplement, du tissu urbain autant qu’industriel lui confèrent bien des atouts. Une région qui peut à terme constituer une véritable locomotive en matière de développement pour les régions périphériques.

Cette région doit être subdivisée en trois régions économiques ; le Grand Alger, le Titteri au centre sud et le Chelif qui s’étend à partir du versant ouest des monts de Blida.

Alger : capitale du pays, Alger est par essence une métropole multiculturelle où cohabitent les langues arabe, amazigh et française de façon harmonieuse et intelligente.

Reconnue zone autonome durant la guerre de libération nationale et recouvrant l’ensemble du périmètre aggloméré du Grand Alger, la capitale doit être érigée en métropole dotée d’un statut spécifique.

REGION V (Le Titteri)

Recouvrant globalement l’ancien département du Titteri, cette région se situe au centre-sud de la capitale et va au-delà des monts de Blida. Elle doit intégrer dans son finage tout le territoire du Titteri et les riches terroirs de Médéa.

REGION VI  (Le Cheliff : espace wilayal Chlef et Aïn Defla)

À lui seul, cet espace grand comme la Belgique, peut constituer une région qu’il faut dissocier de l’espace régional de l’Oranie. Une région au fort potentiel agricole, mais également pourvue d’un réseau urbain appréciable et un tissu industriel, pour l’heure timoré, qu’il convient d’étoffer dans le cadre de la prospection minière et de l’exploitation forestière.

REGION VII

La wilaya V (Oranie) : c’est l’une des plus vastes wilayate historiques. Elle recouvre entièrement l’un des3 départements historiques de la période coloniale. Elle associe dans son fixage des paysages variés : des bassins intérieurs et des plaines littorales aux terroirs très riches, des hautes plaines au régime semi-aride, voire aride, terres de prédilection de l’élevage ; des Monts de Tlemcen, ceux de Traras, Ksour, Saida, Frenda. Des montagnes disposées du Nord au Sud en bandes plus ou moins parallèles.

Des hautes plaines arides couvertes d’une steppe d’alfa et chaînons élevés un peu plus arrosés de L’Atlas saharien (monts des Ksours et Djebel Amour), elle associe des portions d’espaces désertiques qui doivent être restitués aux futures régions identifiées. Les opérations de mise en valeur engagées initialement par la colonisation (la vocation agricole affirmée), le tissu urbain et industriel conséquents dont dispose cette région lui confère un potentiel de développement sans égal. Des ports importants, Oran, Arzew, Mostaganem, sont autant d’infrastructures à même d’assurer des échanges commerciaux d’importance dans une stratégie économique performante.

REGION VIII

Wilaya VI (Sud) : elle occupe un vaste espace au sud de l’Atlas saharien dans sa partie orientale et aux confins des Aurès. Espace désertique par excellence à l’exception de quelques terrains de parcours et d’une activité artisanale à l’intérieur des rares côtes de verdure et de vie que constituent les Oasis. Les pouvoirs publics doivent accorder le plus grand intérêt pour cette région aux fins d’y combler les déficits en matière de développement.

REGION IX (La Saoura)

Une région incluant Tindouf et s’étendant sur l’Erg Iguidi. Des raisons de stratégie géographique, mais également d’activité économique (industrie, artisanat et tourisme) et un peu agricole nécessite la mise en œuvre d’une politique volontariste de développement de cette région.

REGION X (Le Touat – Gourara)

Une région à fort caractère identitaire disposant d’un patrimoine architectural, préhistorique, historique riche, une activité agricole affirmée et des potentialités touristiques avérées. Une zone s’étendant sur les errements dunaires du Grand Erg occidental et Erg Echech et du plateau du Tadmaït, des espaces rayonnant autour de l’agglomération d’Adrar, ville de commandement par excellence autour du triumvirat (Timmimoun – El Goléa -Reggane). L’assiette chevauche en fait les espaces des wilayate historiques V et VI.

REGION XI (Le Grand Erg Oriental)

La région du grand Erg Oriental avec pour capitale régionale Ouargla. Son espace englobant en partie la Hammamda de Tinghert qui se prolonge en Libye. Espace désertique avec quelques rares ilots de végétation au niveau des oasis, dont la plus importante, celle de Touggourt se trouve aux confins nord-est de son espace.
Le riche gisement en hydrocarbure de Hassi Messaoud et du noyau urbain qui s’y développe ont été des garants d’un développement inégal de cette région qui reste fortement amoindrie en matière d’infrastructures.

REGIONXII (La région de l’Ahaggar)

Région qui comptera pour capitale, la légendaire Tamanrasset au riche passé historique. Espace incluant les gisements non négligeables d’In Amenas au Nord de ses limites Orientales. Les formes dépressionnaires du Tidikelt constituent une frontière naturelle la séparant du Touat-Gourara précédemment identifié. Le Tassili n’Ajjer et le Tassili Ahaggar aux confins du Sud du pays, limites frontalières avec le Niger, constituant les autres délimitations de cette région.

Une homogénéité culturelle confère à cet espace une identité séculaire, inaltérée. Un patrimoine protohistorique, faunistique et, au-delà, une position latitudinale géographique d’une importance majeure. Autant d’atouts qui peuvent arrimer la région à une dynamique de développement dans un pouvoir décentralisé.

  • Les régions provinces

A ces cinq nouvelles grandes régions identifiées, il convient de rajouter trois (03) régions naturelles (ou provinces), qui émergent soit par leur identité, soit leur homogénéité historique, géographique, socioculturelle et cultuelle. L’altérité est un gage d’ouverture et de tolérance. A chaque fois qu’une nation prend en charge une spécificité territoriale, communautaire, sociale ou culturelle, elle se prémunit des raccourcis, des caricatures et des nivellements hégémoniques et, ce faisant, enracines-en son sein la culture démocratique.

1-La région du Mzab

Une zone naturelle qui fondera son développement autour de Ghardaia, une capitale très active et rayonnante tout autour de sa pentapole (Mélika – Bounoura – BeniIsguen – El Atteuf). Une vallée où l’activité industrielle, artisanale, commerce, agriculture et tourisme peuvent constituer des éléments moteurs dans le développement de la région.

2- Le Souf

La ville aux mille coupoles, El Oued, la bien nommée, une cité et une Oasis au riche passé historique, une région à la réputation commerçante affirmée, avec des identifiants cultuels et cultuels avérés. Le dynamisme de sa population dans le domaine du négoce à lui seul constitue un atout indéniable. L’homogénéité socioculturelle de sa population est un fait remarquable qui justifie son autonomisation.

3- La Saoura (Région provinciale potentielle)

Autour de la capitale Bechar, et la multitude d’Oasis et le périmètre agricole d’Abadla en sus des gisements miniers qui se trouvent dans son espace peuvent déterminer la mise en œuvre d’un projet de développement spécifique pour cette région naturelle.

 Conclusion

Ce découpage est fondé essentiellement sur des contingences historiques, socio-économiques, culturelles et géographiques que sous-tendent des éléments de biogéographie qui déterminent la viabilité des ensembles régionaux identifiés comme tels.

La problématique renvoie à la nécessité de bâtir un édifice institutionnel et économique cohérent, stable et performant qui appelle la promotion d’une régionalisation avant-gardiste, quelques soient les contours, la dénomination ou les référents. Une régionalisation qui prend en considération les fondements et les réalités de l’espace géographique où se projette la société, les exprime avec l’ensemble de leurs valeurs, dans leurs dimensions et leur diversité culturelle, cultuelle, historique et spatiale considérant que la diversité est toujours source de richesse.

Plus près de nous, le continent africain, déchiré par les frontières aux cordeaux de la colonisation, des propositions institutionnelles réconciliant les peuples et les communautés avec leur histoire sont en cours d’élaboration et, pour certaines, en voie d’application.

De petits pays comme l’Allemagne et d’autres d’étendue plus modeste comme la Suisse, modèles s’il en est en matière de développement et de bonne gouvernance, disposent, pour le premier de seize (16) länder, de sept grandes régions et 26 cantons et demi-cantons pour le second.

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